Je me nomme Aegwyn, et voici mille ans que j’écume
toutes les contrées de ce
monde, me consacrant entièrement à la sauvegarde de ces peuples et de leurs terres, tentant de les
protéger des puissants tentacules des Ténèbres de l’au-delà.
J’ai regardé vaincre les plus puissants des souverains, puis j’ai
assisté à leur perte. J’ai
vu les esprits les plus nobles accomplir les plus louables actions, comme j’ai vu les plus fourbes
fomenter en secret et conspirer contre l’humanité.
Mais je n’ai que
récemment été impliquée directement dans les affaires Humaines. Depuis
la nuit des temps, mon ordre est
chargé de protéger les mortels Humains des mystères des
Ténèbres de l’au-delà, de les épargner des atroces maléfices de ces
mondes d’ailleurs. Les
pouvoirs qui nous furent conférés pour combattre les forces noires de l’Enfer
sinueux sont immenses, et notre
longévité excède même celle des Elfes. Une lourde contrepartie fut exigée pour l’obtention de ces
considérables pouvoirs : le gardien n’a pas le droit d’intervenir dans le monde des Humains avant que ne
soit venu le moment de trouver un successeur digne
d’assurer la charge de Gardien. Ainsi ai-je procédé. Moi - Aegwyn,
ultime Gardienne de l’Ordre de
Tirisfal - ai jugé que mon heure était arrivée.
Le Royaume d’Azeroth
avait vu par quarante-deux fois les arbres perdre leur manteau de
verdure depuis que pour la première fois je pénétrai en ses terres pour
quérir l’illusionniste Nielas
Aran. C’est lui que j’avais choisi pour engendrer l’héritier de mes
pouvoirs. Ce mortel n’était
pas dénué de talent pour la magie, et je pensais qu’il serait le père
idéal pour mon enfant... je ne
me trompais point. Il me donna
un fils, qui naquit en automne de l’an de grâce 559. Je lui donnai le
nom de Medvih - le gardien des
secrets dans la langue antique des Elfes. Je lui transmis tout mon savoir,
tous mes pouvoirs pendant la
première année de sa vie. Mais j’avais au plus profond de son âme enfoui ces secrets qui ne se
révéleraient à lui qu’au jour où il atteindrait la maturité
nécessaire.
Je pensais alors avoir accompli mon devoir en ce monde, je
confiai mon fils aux bons soins de
la famille de son père et m’apprêtai à passer sur l’autre rive...
De loin pourtant, je veillais sur
lui, je le regardais grandir. Je pensais que l’altruisme généreux de
Tirisfal le guiderait dans ses
choix, l’aiderait à tempérer son cœur et à élever son esprit jusqu’à
le rendre digne de réaliser ce
que je pensais être son destin : prendre ma succession et devenir à son
tour Gardien. La veille du jour
de ses treize ans, les pouvoirs enfouis au plus profond de son âme s’éveillèrent.
Incapable de faire face à la violence
des énergies cosmiques qui déferlèrent en lui, Medvih fut victime
d’un choc psychique très traumatisant. La bonté des pères du clergé
de Northshire lui rendit la
paix. Ils prirent en effet mon enfant sous leur protection pendant six
longues années, et apportèrent
soins et réconfort à son corps meurtri.
Medvih finit par
revenir à la vie, en pleine possession semblait-il de ses pouvoirs et de ses facultés. Pourtant, malgré la
façade confiante, presque arrogante qu’il offrait au regard des
autres, je sentais bien, moi, que mon fils portait en lui une chose
maléfique et corrompue. Les
forces de l’Enfer sinueux avaient perverti la sagesse et les pouvoirs qu’il
avait reçus à la naissance en
atteignant la partie Humaine en lui. Son âme était devenue mauvaise, et le resterait à jamais.
Il
fallut attendre la première vague d’assaut des affreuses créatures que
sont les orcs pour que je prenne
réellement la mesure du danger que représentait mon fils...
Medvih décida d’explorer les limites du pouvoir de
manipulation que lui conféraient les énergies magiques
qu’il s’était vu confiées si brutalement. Bravant les interdits, il
se plongea dans la science
nécromantique, se mit en tête de comprendre les mystères de la vie et
de la mort. Il pactisa avec les
Démons des sphères inférieures, utilisant leurs facultés pour
renforcer les siennes. Il
devenait chaque jour plus avide de pouvoir, chacun de ses succès l’entraînant
un peu plus bas dans les abysses de la
folie. Il explora les lointaines sphères astrales, sonda les
mystères des Ténèbres de l’au-delà. C’est alors qu’il errait
dans le tourbillon sans fin de ces
hallucinations cosmiques que Medvih traversa pour la première fois l’infranchissable
frontière du monde de l’au-delà
pour apercevoir l’espace d’un très court instant les effroyables, les monstrueuses créatures de ces
lieux. Medvih avait enfin trouvé l’arme absolue qu’il avait tant
cherchée... Fermement décidé à se rendre maître d’Azeroth, Medvih
se servit des connaissances que
Tirisfal lui avaient transmises pour conclure un arrangement avec le
sorcier Gul’dan - le plus puissant des seigneurs régnant sur le monde
sombre et sanguinaire qui
hantait ses visions. Communiquant
avec Gul’dan grâce à des transes profondes et des projections
astrales, Medvih prétendit qu’un
tombeau antique enfoui sous les flots renfermait un pouvoir défiant l’imagination. Sargeras, le Seigneur
des Démons que j’avais vaincu à l’issu d’un terrible duel huit
cents ans plus tôt était bien dans ce tombeau. Il me paraissait
toutefois impossible de savoir
si ce sépulcre renfermait les pouvoirs de Sargeras ou seulement sa
dépouille. Je l’ignorais moi-même.
Pourtant la seule idée
de pouvoir posséder les pouvoirs d’un Seigneur des Ténèbres suffisait
à l’insatiable Gul’dan pour
accepter le marché de Medvih. Medvih proposait de révéler à Gul’dan
la position du Tombeau qui mettrait le monde à ses pieds. Medvih
réclamait en échange l’anéantissement
total de ceux qu’il estimait être les seuls susceptibles de s’opposer
à son irrésistible ascension : les
habitants du grandissime Royaume d’Azeroth. Ainsi,
en l’an de grâce 583, Medvih ouvrit la première de ses portes
artificielles entre le royaume
lumineux d’Azeroth et le monde sanglant des orcs. L’heure du trépas
approchait pour moi. Je décidai
pourtant de rendre visite à Medvih en sa tour mystique, dans l’espoir
de le dissuader d’emprunter un
chemin qui à coup sûr mènerait à sa perte. Mais les pouvoirs qui autrefois furent ceux du bon Tirisfal
étaient pervertis en lui, et mes prières furent impuissantes. J’eus
beau employer toute l’énergie qui restait à mon corps vieilli, je lui
avais cédé tous mes pouvoirs
depuis si longtemps qu’il me domina facilement avant de me chasser hors
de sa vue.
L’arrivée de Gul’dan
et de Blackhand, Seigneur de la guerre de la Horde marqua le début d’un
conflit qui allait déchirer le Royaume d’Azeroth pendant près de cinq
années. Les champs auparavant si fertiles du Royaume furent saccagés par
les sauvages armées des orcs. A leur départ Azeroth n’était plus qu’une
immense friche. Mais Medvih, aussi habile et rusé qu’il fut, ne vécut
pas assez longtemps pour voir son projet se réaliser. De vaillants
soldats azerothiens avaient pris d’assaut sa tour secrète et occis mon
fils dans la salle même où il avait conclu avec la Horde le pacte qui
scellait la chute d’Azeroth. Le grand Seigneur de la guerre Blackhand
périt lui aussi peu avant de triompher, trahi par son vassal, Orgrim
Doomhammer. Le peuple d’Azeroth subit lui aussi une très lourde perte
lorsque son souverain, le juste et bon Roi Llane, périt lors du siège du
Fort de Stormwind qui tomba par la suite aux mains de la Horde des orcs.
Jamais les survivants du désastre n’auraient gardé la vie sauve et
fuit leur patrie si Anduin Lothar, Chevalier errant de la Confrérie du
Cheval et héros de guerre n’avait guidé vaillamment leur exode.
Medvih et ses sortilèges
n’étaient plus. Cependant, des centaines d’orcs continuaient chaque
jour de pénétrer le territoire des hommes en empruntant la Porte.
Blackhand mort, Orgrim ne tarda guère à s’emparer du contrôle du clan
de Blackrock, le plus puissant des clans de la Horde. Gul’dan le
tristement célèbre Sorcier et le chef du clan de Stormreaver laissèrent
les autres se disputer sur les clans restants. On raconta qu’ils
étaient occupés à appareiller un gigantesque vaisseau pour partir en
quête du Tombeau de Sargeras. Rend et Maim, tous deux également
redoutables et tous deux fils de Blackhand bénéficient du soutien d’un
bon nombre d’orcs, ils comptent bien contester au félon Doomhammer la
domination de la Horde. Malgré les luttes qui déchirent la Horde, il ne
fait aucun doute que toutes les factions s’uniront derrière Doomhammer
afin de pourchasser sans répit les renégats d’Azeroth, et ce quelle
que soit la route que ceux-ci décideront d’emprunter...
L’Alliance de
Lordaeron
Lorsque les réfugiés
azerothiens atteignirent les rivages de Lordaeron, le Roi Terenas convoqua
un conseil formé de représentants de chacun des sept Royaumes dont il
était souverain. Le récit que fit lord Anduin Lothar des carnages et des
destructions que les orcs avaient perpétrés sur le sol d’Azeroth
persuada le souverain de Lordaeron qu’il était impératif de s’unir
contre la menace représentée par la Horde. Après querelles animées et
discussions houleuses, les seigneurs se rendirent à l’avis des sires
Lothar et Terenas, acceptant d’unir leurs armées et de les placer sous
le haut commandement de lord Lothar en personne. Les côtes de Lordaeron
avaient déjà eu à pâtir d’assauts isolés des orcs, si bien que le
Seigneur Lothar trouva un appui solide en son ami de longue date, l’Amiral
Proudmoore, souverain du royaume côtier de Kul Tiras. Le vaillant
Seigneur de Stromgarde, Thoras Trollbane, se montra lui aussi prompt à
soutenir Lothar, voyant là une promesse d’imminents et glorieux combats
à mener. Ces nobles guerriers n’étaient cependant pas les seuls qui s’armaient
pour guerroyer... S’appuyant sur les Ecritures Saintes qui exhortent les
fidèles à "revêtir l’armure du juste et combattre le mal",
Alonsos Faol - grand prêtre de l’abbaye de Northshire Abbey avant que
les orcs ne la détruise - appela le clergé de Lordaeron à armer
prêtres et moines. De même que les gardiens sacrés brandirent leurs
épées de lumière pour défendre les cieux , les serviteurs de dieu sur
terre acceptèrent de combattre la vague des ténèbres qui allait s’abattre
sur Lordaeron. Les Nains d’Ironforge accoururent des passages
souterrains de Khaz Modan, rapportant que les orcs avaient déjà entamé
l’invasion de leur Royaume montagneux. Les Nains proposaient d’offrir
à l’Alliance leurs armes et leurs ingénieuses inventions si les
Humains acceptaient de repousser les orcs hors de leurs frontières. Même
les Elfes de la lune d’argent, de nature pourtant très réservée,
sortirent de l’ombre de la forêt de Quel’thalas pour proposer leurs
services à l’Alliance. Ils avaient appris grâce à leurs pouvoirs
magiques étroitement liés aux forces telluriques que Lordaeron était l’une
des nombreuses cibles de la macabre offensive que fomentait la Horde.
Rancoeurs et haines injustifiées qui depuis la nuit des temps opposaient
ces trois races furent mises de côté, une union nouvelle unissait ces
peuples voisins. Cette union, qui allait faire leur force, fut célébrée
aux quatre coins du Royaume de Lordaeron sous le nom de l’Alliance.
Ainsi, unis devant un seul et redoutable ennemi, les Humains et leurs
nouveaux alliés étaient prêts. Vaillants et confiants, ils attendaient,
sur la rive de leur destinée la déferlante vague des ténèbres.